Perception et usage de la cigarette électronique dans la population étudiante du campus de Villejean, Rennes, avril 2014

// Perception and use of the electronic cigarette among the student community of the Villejean Campus, Rennes (France), April 2014

Stagiaires du cours IDEA 2014*1, Hubert Isnard2, Brigitte Helynck3, Pascal Crépey1,4 (pascal.crepey@ehesp.fr)
1 École des hautes études en santé publique, Rennes, France
2 Epiter, Saint-Maurice, France
3 Institut de veille sanitaire, Saint-Maurice, France
4 UMR 190, Émergence des pathologies virales, Marseille, France


* Les stagiaires du cours d’épidémiologie appliquée IDEA 2014 : Marie Amsilli, Kristell Aury-Hainry, Jade Assoukpa, Euripide Avokpaho, Norbert Belon, Sophie Blanchi, Amandine Bonnay, Anaïs Broban, Valentina Carnimeo, Fanny Collange, Arsène Hema, Hervé Le Perff, Hélène Lepoivre, Hager Letaief, Olivier Lorin de la Grandmaison, Mathilde Melin, Céline Pacault, Hélène Perin, Marion Petit-Sinturel, Rémi Poirier, Catherine Rey-Quinio, Maelle Robert, Leila Saboni, Asma Saidouni, Jessica Sayyad Neerkorn, Marion Subiros, Noémie Vanel, Fabien Taieb.
Soumis le 13.01.2015 // Date of submission: 01.13.2015
Mots-clés : Cigarette électronique | Étude transversale | Sevrage tabagique | Tabagisme | Étudiants
Keywords: Electronic cigarette | Cross-sectional study | Smoking cessation | Smoking | Students

Résumé

Introduction –

Apparues en 2004, les cigarettes électroniques sont utilisées par des millions de personnes dans le monde, dont de nombreux fumeurs, comme aide au sevrage tabagique. Cependant, leur place dans la lutte anti-tabac est controversée en raison d’un manque d’études permettant d’éclairer le débat de santé publique qu’elles suscitent.

Méthodes –

Une enquête transversale sur la population étudiante du campus de Villejean à Rennes a été réalisée en avril 2014. Les objectifs principaux étaient d’estimer la proportion d’utilisateurs dans la population étudiante et d’évaluer l’impact du « vapotage » sur la consommation de tabac. Une analyse multivariée a permis de mettre en évidence les principaux facteurs associés au vapotage régulier.

Résultats –

Les enquêteurs ont interrogé 1 362 étudiants (6,9% du campus). La proportion d’étudiants ayant expérimenté la cigarette électronique est estimée à 35,3% [32,8% ; 37,9%] pour 5,7% [4,5% ; 7,0%] de vapoteurs réguliers. L’analyse multivariée montre qu’être « fumeur quotidien » (ratio de prévalence ajusté (RP) 11,8 [IC95%:5,3-26,5]), penser que la cigarette électronique est un bon moyen de sevrage tabagique (RP 4,29 [IC95%:1,69-10,91]), et qu’elle est plus économique (RP 2,44 [IC95%:1,01-5,91]) sont les principaux facteurs associés au vapotage régulier. Les vapoteurs réguliers déclarent à 68% avoir diminué leur consommation de tabac, et à 24% l'avoir arrêtée.

Conclusion –

Bien que déclarative, cette étude évalue l’usage et l’impact potentiel de la cigarette électronique sur la diminution et l’arrêt du tabac chez les étudiants. Ces résultats montrent l’urgence de la réalisation d’études cliniques d’envergure permettant de mesurer précisément l’impact sanitaire de ce phénomène.

Abstract

Introduction –

Since 2004, electronic cigarettes are used by millions of individuals worldwide, among them smokers trying to quit smoking. However, their role in the fight against tobacco is discussed because of the lack of studies to enlighten the public health debate.

Methods –

A cross sectional study was performed on the student population of the Villejean Campus in Rennes, France, in April 2014. The primary objectives were to estimate the proportion of users among the students, and evaluate the impact of electronic cigarette use on tobacco consumption. A multivariate analysis was performed to identify the main determinants of regular electronic cigarette use.

Results –

Interviewers questioned 1,362 students (6.9% of the campus). The proportion of students having tested an electronic cigarette was estimated to 35.3% [32.8% ; 37.9%] with 5.7% [4.5% ; 7.0%] of regular users. The multivariate analysis shows that being a “daily smoker” (prevalence ratio (PR) 11.8 [95%CI:5.3-26.5]), thinking that electronic cigarette is a good way of quitting tobacco (PR 4.29 [95%CI:1.69-10.91]), and is cheaper than tobacco (PR 2.44 [95%CI:1.01-5.91] are the main factors associated to regular electronic cigarette use. Among regular users, 68% reported having decreased their tobacco consumption, and 24% having stopped.

Conclusion –

Although based on declarations, this study evaluates the use and potential impact of the electronic cigarette on the reduction of tobacco consumption among students. Our results show the need for large-scale clinical studies measuring the sanitary impact of this new practice.

Introduction

Depuis leur lancement en 2004, les cigarettes électroniques (e-cigarettes) ont été achetées par des millions de personnes aux États-Unis et en Europe et leurs ventes pourraient dépasser les ventes de cigarettes en une décennie 1. Certaines études suggèrent que les e-cigarettes pourraient aider les fumeurs à cesser ou au moins réduire leur consommation 2,3,4. Cependant, les preuves de leur efficacité par rapport à d’autres méthodes n’ont pas encore été apportées 5. La place des e-cigarettes dans la lutte contre le tabagisme est donc controversée 6,7. En effet, elles peuvent d’une part normaliser à nouveau l’acte de fumer, et d’autre part poser un risque sanitaire direct, des substances toxiques ayant été mises en évidence dans leurs vapeurs 8. Cependant, les caractéristiques de l’utilisation de la cigarette électronique (vapotage) et de ses utilisateurs (vapoteurs) en France restent encore peu connues, à l’exception de l’étude Etincel menée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) en 2013 9, et de l’enquête Baromètre santé 2014 de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) 10.

Le tabagisme étant particulièrement prévalent dans la population étudiante française 11, nous avons réalisé une étude transversale au sein d’un campus universitaire afin d’estimer la prévalence de l’usage d’e-cigarette dans cette population et d’estimer les liens entre vapotage et consommation de tabac.

Méthodes

Une enquête transversale a été conduite au cours d’une seule journée, en avril 2014, sur le campus de Villejean (Rennes), par 28 stagiaires de la formation d’épidémiologie appliquée IDEA, organisée par l’École des hautes études en santé publique et l’Institut de veille sanitaire. Un échantillon a été constitué à partir de la population étudiante présente : neuf lieux répartis sur l’ensemble du campus et identifiés comme étant les principaux lieux de passage ont été sélectionnés, et les étudiants fréquentant ces lieux ont été sélectionnés avec un « pas de sondage temporel » correspondant au temps d’administration du questionnaire. Le nombre de sujets nécessaire a été évalué à 1 500 participants sur la base d’un taux de prévalence du vapotage de 3%, d’un risque alpha de 5% et d’une précision souhaitée de 1,5%. Les données ont été recueillies en face à face, via un questionnaire standardisé, ainsi que des données succinctes auprès des étudiants refusant de participer à l’enquête (âge, sexe, statut vapoteur et/ou fumeur).

Le statut tabagique et le vapotage ont été définis selon les modalités suivantes : les non-fumeurs n’ont jamais fumé, les anciens fumeurs ont déjà fumé mais pas dans les 30 derniers jours, les fumeurs occasionnels ont fumé dans les 30 derniers jours mais pas quotidiennement, les autres sont des fumeurs quotidiens. Les non-vapoteurs n’ont jamais essayé l’e-cigarette, les vapoteurs réguliers vapotent au moins une fois par semaine (71% d’entre eux vapotent tous les jours), les vapoteurs expérimentateurs ou occasionnels vapotent ou ont vapoté moins d’une fois par semaine dans les 30 derniers jours et les ex-vapoteurs sont d’anciens vapoteurs réguliers n’ayant pas vapoté depuis au moins 30 jours. Le questionnaire a été informatisé sur la plateforme Wepi© (EpiConcept) et la saisie a été faite sur tablette, smartphone (application ODK) ou sur papier.

Les analyses ont été réalisées à l’aide de Stata 13.0® (Stata Corporation, College Station, Texas, USA). Les comparaisons entre variables ont été réalisées au moyen des tests de Student, Chi2 ou des tests exacts de Fisher. Les déterminants retenus dans les régressions multivariées avaient une valeur p<20% dans une première analyse univariée. Ces régressions ont utilisé des modèles de Poisson, avec correction de la variance par l’algorithme d’Huber/White/Sandwich, afin d’obtenir des ratios de prévalence (RP).

Résultats

Sur 19 799 étudiants inscrits sur le campus de Villejean à Rennes, 1 496 (7,6%) ont pu être interrogés, parmi lesquels 1 362 (91%) ont accepté de participer. Les femmes représentaient 62% de l’échantillon et l’âge moyen était de 21 ans, avec des extrêmes de 17 à 58 ans. Les caractéristiques d’âge, de sexe et d’utilisation de l’e-cigarette des 134 étudiants ayant refusé de participer n’étaient pas statistiquement différentes de celles des répondants, sauf sur l’usage du tabac, plus important chez les répondants (52% vs. 36%, p<0,001).

Parmi les étudiants ayant répondu à l’enquête, 5,7% étaient vapoteurs réguliers, 2,1% ex-vapoteurs et 35,3% expérimentateurs. Un peu plus de la moitié (56,9%) n’avaient jamais vapoté (tableau 1). De plus, un seul vapoteur régulier sur 77 (1,39%) déclarait n’avoir jamais fumé de cigarette, les non-fumeurs représentaient 2,91% des expérimentateurs (14 sur 481).

Tableau 1: Distribution, en fonction du statut tabagique et de la pratique de la cigarette électronique, des étudiants ayant répondu à l’enquête « vapotage » Campus Villejean, Rennes, avril 2014
Agrandir l'image

Les vapoteurs utilisaient majoritairement leur e-cigarette dans les espaces privés (70,3%) ainsi qu’à l’extérieur (38,7%). La quasi-totalité des vapoteurs réguliers les utilisaient avec de la nicotine (96,1%).

Sur l’ensemble des vapoteurs interrogés, une large majorité (80%) déclarait avoir essayé l’e-cigarette pour la nouveauté, 18% pour réduire leur consommation de tabac et 15% pour des raisons économiques (figure).

Parmi l’ensemble des vapoteurs, 66% trouvaient que l’e-cigarette procure moins de plaisir que le tabac. Ce phénomène était plus marqué chez les fumeurs quotidiens (81%) que chez les fumeurs non-réguliers (60%) et les anciens fumeurs (28%) (p<0,001).

Figure : Principales motivations à l’usage de l’e-cigarette des vapoteurs de l’étude. Enquête « vapotage » Campus Villejean, Rennes, avril 2014
Agrandir l'image

Une comparaison entre les étudiants ayant des comportements établis de vapoteurs réguliers ou de non-vapoteurs a été réalisée ; les anciens vapoteurs et les vapoteurs « expérimentateurs » ont été exclus de cette comparaison (tableau 2). Cette comparaison indique que la moyenne d’âge des vapoteurs réguliers et des non-vapoteurs n’était pas statistiquement différente. Les étudiants masculins étaient 1,57 [1,02 ; 2,40] fois plus nombreux à vapoter régulièrement que les étudiantes. Concernant les filières d’études, l’analyse univariée montre que la filière sciences humaines compte plus de vapoteurs réguliers que les autres filières (RP : 3,08 [1,46 ; 6,48]). Par ailleurs, comparé aux non-fumeurs dans cette filière, il existait là aussi un usage régulier de l’e-cigarette beaucoup plus fréquent chez les fumeurs occasionnels (RP : 27,15 [3,57 ; 206,67]) ou quotidiens (RP : 82,37 [11,5 ; 590,14]).

Quelle que soit la catégorie du répondant, l’e-cigarette semblait être majoritairement perçue comme moins dangereuse que le tabac. Parmi les vapoteurs réguliers, une plus grande proportion considérait l’e-cigarette sans danger pour son utilisateur (p<0,007) et son entourage (p<0,001). Les fumeurs n’ayant jamais vapoté étaient moins nombreux à penser que le vapotage modifie favorablement les relations sociales (p<0,001). Enfin, les vapoteurs étaient significativement plus nombreux à penser que l’e-cigarette est financièrement plus avantageuse que le tabac (p<0,001).

De plus, 64% des étudiants interrogés pensaient que l’e-cigarette pouvait être une aide au sevrage tabagique. Cette opinion montait à plus de 85% parmi les vapoteurs réguliers (p<0,001).

Les fumeurs quotidiens de notre enquête étaient plus nombreux à avoir essayé d’arrêter de fumer (51%) que les fumeurs occasionnels (35%) (p<0,005). Parmi ces fumeurs ayant tenté le sevrage, 75% l’avaient fait sans autre aide que leur seule volonté et 20% avaient utilisé l’e-cigarette ou des substituts nicotiniques (patch, gommes...). Parmi les vapoteurs-fumeurs, 46% avaient déjà essayé d’arrêter de fumer, mais ils étaient 68% à déclarer avoir diminué leur consommation tabagique grâce à l’e-cigarette (seulement 22% lorsqu’ils fumaient encore quotidiennement).

Tableau 2 : Perceptions liées à l’utilisation de l’e-cigarette selon le statut vis-à-vis du tabac et du vapotage. Enquête « vapotage » Campus Villejean, Rennes, avril 2014
Agrandir l'image

Un modèle multivarié a été construit afin d’identifier les déterminants significatifs du vapotage régulier chez les étudiants par comparaison avec les non-vapoteurs (tableau 3). Le genre n’est pas apparu comme un facteur de vapotage régulier. En revanche, être étudiant dans les filières odontologie ou sciences humaines était associé à l’utilisation de l’e-cigarette. Le niveau de consommation de tabac est clairement apparu comme un déterminant du vapotage régulier : les fumeurs occasionnels vapotaient plus que les non-fumeurs, et les fumeurs quotidiens davantage encore. La perception de l’e-cigarette était également un facteur important pour son usage : le fait de penser que l’e-cigarette est une méthode de sevrage efficace, ou de penser qu’elle nécessite un budget moindre, était associé à son utilisation. Au contraire, penser qu’elle peut être dangereuse pour l’entourage était associé à une utilisation moindre.

Tableau 3 : Déterminants du vapotage régulier chez les étudiants (analyse multivariée par régression de Poisson). Enquête « vapotage » Campus Villejean, Rennes, avril 2014
Agrandir l'image

Discussion

Notre étude sur le campus de Villejean, à Rennes, en avril 2014, a montré que 56,9% [54,2% ; 59,6%] d’étudiants n’avaient jamais vapoté, 35,3% [32,8% ; 37,9%] étaient expérimentateurs, 5,7% [4,5% ; 7,0%] étaient vapoteurs réguliers et 2,1% [1,4% ; 3,0%] ex-vapoteurs.

Ces chiffres ne sont pas éloignés des résultats de l’enquête Etincel-OFDT sur l’e-cigarette chez les 15-24 ans (enquête téléphonique par quotas effectuée en 2013 en France métropolitaine chez les 15-74 ans), qui montrent une proportion similaire de non-vapoteurs mais une proportion d’expérimentateurs moins importante (31,0%) et de vapoteurs réguliers plus élevée (9,0%).

En février 2015, les premières données issues du Baromètre Santé Inpes 2014 11 (enquête téléphonique sur un échantillon représentatif de la population des 15-75 ans en France métropolitaine) donnent des proportions de 26% d’expérimentateurs et de 6% de vapoteurs (dont 3% de vapoteurs quotidiens).

Ces différences pourraient s’expliquer, d’une part, par des définitions différentes des vapoteurs réguliers et, d’autre part, par des populations d’étude d’âges différents, qui impliquent des prévalences de tabagisme différentes.

L’échantillon de notre étude ne repose pas strictement sur une méthode de sondage aléatoire. Toutefois, les conditions de conduite de l’enquête (répartition sur différents lieux du campus et interview des étudiants tout au long de la journée) peuvent permettre d’assimiler la méthode d’échantillonnage à un tirage de type sondage aléatoire systématique et laisser supposer que l’échantillon des répondants était représentatif de la population estudiantine du campus de Villejean.

Même si cette étude est centrée sur une seule ville et une population spécifique, elle permet de mettre en évidence certaines raisons pouvant expliquer l’engouement pour cette nouvelle pratique chez les jeunes. En effet, malgré des perceptions de l’e-cigarette différentes chez les utilisateurs par rapport aux non-utilisateurs, cette dernière était majoritairement perçue comme sans danger pour l’entourage et présentant un danger moindre que le tabac pour l’usager. De plus, les vapoteurs, majoritairement fumeurs, estimaient dépenser moins d’argent pour le vapotage que pour le tabac. Ils étaient aussi plus nombreux à penser que l’e-cigarette pouvait avoir un impact positif sur les relations sociales (pas d’odeurs de tabac gênantes pour l’entourage), par rapport aux fumeurs n’ayant jamais vapoté. Les vapoteurs réguliers ont indiqué utiliser fréquemment l’e-cigarette dans les lieux publics (34,2%), ce qui peut constituer un contournement de l’interdiction de fumer dans ces lieux.

L’ajustement par l’analyse multivariée a permis de montrer que le genre n’était pas un facteur significatif du vapotage. Les facteurs intuitivement pressentis comme favorisant le vapotage ont été confirmés : être fumeur ou avoir une perception positive globale de l’e-cigarette (effet sur l’entourage, aide au sevrage, économies réalisées) apparaissent comme des déterminants du vapotage régulier.

Notre étude a montré que les usagers réguliers de la cigarette électronique ont la perception d’un impact sur leur consommation de tabac : 68% des fumeurs qui vapotent ont déclaré avoir réduit leur consommation de tabac (22% quand ils sont fumeurs quotidiens), 24% des vapoteurs réguliers ont déclaré que vapoter les aidait à se sevrer du tabac et 28% de ces déclarants ne fument plus. Des observations identiques ont été faites dans les études d’Etter et coll. 3, de Dawkins et coll. 4 et du Baromètre santé Inpes 2014 10. De plus, l’e-cigarette fait partie des trois moyens de sevrage les plus cités par les fumeurs ayant tenté d’arrêter de fumer, même si la « volonté seule » est la plus souvent mentionnée. Ces données indiquent qu’il est nécessaire d’étudier le rôle potentiel de la cigarette électronique sur le sevrage tabagique sur le long terme.

Enfin, un vapoteur régulier a déclaré n’avoir jamais fumé de tabac, illustrant ainsi le risque, même restreint (1,39% des vapoteurs réguliers), pour l’e-cigarette de constituer une porte d’entrée supplémentaire vers la dépendance nicotinique.

Conclusion

Dans la population enquêtée sur le campus de Villejean, les étudiants vapoteurs étaient en majorité des fumeurs de tabac réguliers. Ils trouvaient dans l’e-cigarette une alternative plus économique au tabac et aussi, pour les deux tiers d’entre eux, une aide pour diminuer leur consommation de tabac, davantage que pour l’arrêter. À l’inverse, l’e-cigarette pourrait aussi conduire des non-fumeurs à la dépendance nicotinique, mais dans une faible mesure selon notre étude. Il est possible que le nombre de nouveaux vapoteurs se stabilise en raison de l’extension de la législation anti-tabac, notamment l’interdiction de la vente d’e-cigarettes aux mineurs, l’interdiction de leur publicité et la restriction du vapotage dans les lieux publics. En contrepartie, le nombre d’ex-vapoteurs risque d’augmenter ; or si l’e-cigarette permet de réduire la consommation tabagique, elle peut entretenir ou augmenter la dépendance à la nicotine. Il serait donc nécessaire d’étudier l’évolution de la consommation de tabac des anciens vapoteurs. Enfin, les risques sanitaires de la cigarette électronique doivent être évalués par des études cliniques d’envergure permettant de mesurer tous les risques sanitaires directs et indirects liés à cette nouvelle pratique.

Remerciements

Les auteurs souhaitent remercier Curtis Broderick et EpiConcept pour leur soutien logistique bénévole pendant l’enquête, Karine Gallopel-Morvan pour ses éclairages sur le sujet et tous les encadrants de la formation IDEA ayant participé de près ou de loin à ce travail.

Références

1 Purkayastha D. BAT ramps-up e-cigarette expansion as sales go up in smoke. International Business Times. 2013, Jul 31. [Internet]. http://www.ibtimes.co.uk/articles/495893/20130731/british-american-tobacco-e-cigarette-profit-vype.htm
2 Office français de prévention du tabagisme. Rapport et avis d’experts sur l’e-cigarette. Paris: OFT; 2013. 212 p. http://www.ofta-asso.fr/docatel/Rapport_e-cigarette_VF_1.pdf
3 Etter JF. Electronic cigarettes: a survey of users. BMC Public Health. 2010;10:231.
4 Dawkins L, Turner J, Roberts A, Soar K. ‘Vaping’ profiles and preferences: an online survey of electronic cigarette users. Addiction. 2013;108(6):1115-25.
5 Bullen C, Howe C, Laugesen M, Mcrobbie H, Parag V, Williman J, et al. Electronic cigarettes for smoking cessation : a randomised controlled trial. Lancet. 2013;6736(13):1-9.
6 Hajek P, Foulds J, Le Houezec J, Sweanor D, Yach D. Should e-cigarettes be regulated as a medicinal device? Lancet Respir Med. 2013;1(6):429-31.
7 Cobb NK, Cobb CO. Regulatory challenges for refined nicotine products. Lancet Respir Med. 2013;1(6):431-3.
8 U.S. Food and Drug Administration. Public health focus. Summary of results: Laboratory analysis of electronic cigarettes conducted by FDA. [Internet]. http://www.fda.gov/NewsEvents/PublicHealthFocus/ucm173146.htm
9 Lermenier A, Palle C. Résultats de l’enquête Etincel-OFDT sur la cigarette électronique. Prévalence, comportements d’achat et d’usage, motivations des utilisateurs de la cigarette électronique. Note n° 2014-01. Saint-Denis: OFDT; 2014. 15 p. http://www.ofdt.fr/BDD/publications/docs/eisxalu2.pdf
10 Premiers résultats tabac et e-cigarette. Caractéristiques et évolutions récentes. Résultats du Baromètre santé Inpes 2014. Dossier de presse. Saint-Denis: Inpes, 2015. 10 p. http://www.inpes.sante.fr/70000/dp/15/dp150224-def.pdf
11 Guignard R, Beck F, Richard JB, Peretti-Watel P. Le tabagisme en France : analyse de l’enquête Baromètre santé 2010. Saint-Denis: Inpes (coll. Baromètres); 2013. 56 p. http://www.inpes.sante.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1513.pdf

Citer cet article

Stagiaires du cours IDEA 2014, Isnard H, Helynck B, Crépey P. Perception et usage de la cigarette électronique dans la population étudiante du campus de Villejean, Rennes, avril 2014. Bull Epidémiol Hebd. 2015;(17-18):320-6. http://www.invs.sante.fr/beh/2015/17-18/2015_17-18_7.html