COSMOP : surveillance de la mortalité selon l’activité professionnelle

Dans le cadre de la surveillance épidémiologique des risques professionnels, le programme Cosmop s’appuie sur des sources de données existantes pour produire des indicateurs de mortalité selon l’activité professionnelle.  

Publié le 22 avril 2019

Qu’est-ce que COSMOP ? 

COSMOP est un programme de surveillance épidémiologique de la mortalité par causes selon l’activité professionnelle. Ses objectifs sont d’élaborer et de diffuser régulièrement auprès des acteurs concernés (pouvoirs publics, médecins du travail, préventeurs, partenaires sociaux…) des indicateurs de mortalité par cause selon l’activité professionnelle. 

Les indicateurs réunis pourront servir plusieurs objectifs : 

  • Orienter les actions de prévention. En particulier pour la mortalité des sujets jeunes et en activité, la diffusion des résultats auprès des acteurs et des pouvoirs publics peut mener à des campagnes ciblées et spécifiques.
  • Objectiver des situations supposées problématiques (« cluster » de décès dans des collectivités de travail). Les taux de mortalité des travailleurs d’une entreprise pourront être confrontés aux données de référence nationales en tenant compte de la structure des professions et du secteur de l’entreprise.
  • Contribuer au repérage de professions et de secteurs à risque particulier. L’observation de surmortalités inexpliquées dans certains groupes professionnels doit permettre de générer des hypothèses et des études ciblées et orienter la surveillance selon le secteur d’activité. 

A plus long terme, par l’observation des tendances, évaluer l’impact des évolutions du travail, tant du point de vue des procédés que de l’organisation du travail, et l’impact des politiques de prévention. Le programme Cosmop s’appuie sur des données existantes et recueillies en routine dans le cadre d'un dispositif pérenne. Il concerne l’ensemble des classes d’âges à partir de 16 ans, les deux genres et toutes les situations de travail en France quels que soient la profession et le secteur d’activité. 

Sources de données

Le programme Cosmop s’appuie sur des données existantes et recueillies en routine dans le cadre d'un dispositif pérenne. Il concerne l’ensemble des classes d’âges à partir de 16 ans, les deux genres et toutes les situations de travail en France quels que soient la profession et le secteur d’activité. 

Du fait de ses travaux sur les différences sociales de mortalité, la direction santé travail de Santé publique France s'est naturellement rapprochée de l'Insee afin d’identifier les sources de données disponibles sur les trajectoires individuelles socioprofessionnelles, contenant par ailleurs les informations démographiques permettant de rechercher le décès éventuel du sujet et sa cause. 

En accord avec le Département de la démographie de l’Insee, une première étude a été conduite à partir des données de l’Echantillon démographique permanent de l’Insee. 

Une nouvelle analyse a ensuite été réalisée, en partenariat avec le département de l'emploi et des revenus d’activité et le département de la démographie de l'Insee à partir d'un nouvel échantillon issu du "Panel DADS" : cet échantillon, longitudinal et ouvert, est constitué et géré par l’Insee à partir des déclarations annuelles de données sociales dont il est destinataire. 

Le statut  vital des personnes a été recherché au répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP). Les causes médicales des décès recensés ont ensuite été recherchées auprès du Centre d’épidémiologies sur les causes médicales de décès (CépiDc) de l’Inserm. 

Ce travail a mis en évidence les avantages et les limites des sources exploitées ; il a également permis de définir les indicateurs qu’il est possible de produire à partir de ces données et de formuler des recommandations pour la mise en place d’un système de surveillance pérenne de la mortalité 

Premiers résultats

Exploitation des données issues de l’échantillon démographique permanent (EDP)

En accord avec le Département de la démographie de l’Insee, une première étude a été conduite à partir des données de l’Echantillon démographique permanent de l’Insee. 

Cet échantillon au 100e de la population vivant en France a été mis en place en 1968 par l’Insee, avec pour objectif initial de constituer une vaste base de données longitudinale représentative des personnes vivant en France. Les sources d’information sont principalement constituées par les bulletins de recensement et les bulletins d’état civil récoltés pour chacun des sujets inclus. L’échantillon a été élargi plus récemment au 25e (à partir de 2004 pour l’état civil et 2008 pour le recensement). De par sa méthode de construction et de suivi, cet échantillon peut être considéré comme représentatif de la population, et intègre tous les types de travailleurs (salariés, indépendants, exploitants agricoles, etc.). Les principales limites de cette base sont relatives à l'absence d'informations professionnelles au cours des périodes intercensitaires. 

Santé publique France a dans un premier temps exploité, à titre de faisabilité, les données de cet échantillon (version 1968-1990). La cause médicale principale des décès recensés a été recherchée auprès du CépiDc de l'Inserm. Les résultats de cette exploitation ont fait l'objet d'un rapport en 2006. 

Chez les hommes, le secteur industriel se distinguait par une tendance à des excès de mortalité (sauf dans la construction électrique et électronique). Cette surmortalité concernait diversement les pathologies cancéreuses, non cancéreuses et les morts violentes selon l’industrie considérée. Dans le secteur tertiaire en revanche, les hommes présentaient plutôt des taux comparables ou inférieurs à l’ensemble des autres secteurs, à l’exception notable des secteurs du commerce alimentaire et de l’hôtellerie-restauration, pour lesquels des excès de décès par cancer digestif et par certaines pathologies non cancéreuses et morts violentes étaient observés. Le secteur agricole, quant à lui, se distinguait par une sous-mortalité par cancer et par cardiopathie ischémique, contrastant avec une surmortalité pour d’autres pathologies non cancéreuses et pour les suicides. 

Exploitation des données issues du panel DADS 

Une nouvelle analyse a été réalisée, en partenariat avec le département de l'emploi et des revenus d’activité et le département de la démographie de l'Insee à partir d'un nouvel échantillon issu du "Panel DADS". 

Le Panel DADS a été constitué par l'Insee par l'accumulation, depuis 1976, des déclarations annuelles de données sociales (DADS) d’un échantillon de salariés inclus selon leur date d’anniversaire (échantillon au 1/24e). Le champ d’exploitation des DADS recouvre l’essentiel des secteurs privé et semi-public et représente environ 80 % des emplois salariés. 

En 2002, le champ de ce panel a été élargi au 1/12, soit 8 % de la population salariée en France. 

Santé publique France a exploité les données du Panel dans sa version 1976-2002. Le statut vital des personnes a été recherché dans le répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP) et la cause médicale principale des décès recensés auprès du CépiDc de l'Inserm. 

Deux principaux indicateurs ont été calculés : les risques relatifs permettant des comparaisons entre sous-groupes et les taux de mortalité permettant de dresser des bilans de mortalité par cause de décès, et ce, selon différents critères d’exposition : 

  • avoir versus ne jamais avoir exercé dans le secteur d’activité ; 
  • avoir sa dernière activité professionnelle connue dans le secteur ;
  • avoir son activité professionnelle dans le secteur l’année considérée.

Des taux de mortalité ont été calculés sur l’ensemble de la population active afin de disposer de données de référence pour étudier la mortalité des travailleurs. 

Les résultats ont fait l'objet d'un rapport général en 2018. 

Les résultats obtenus étaient globalement cohérents avec les observations issues du premier échantillon. Sur la période étudiée, certains secteurs apparaissaient plus à risque de décès, particulièrement certaines industries (telles que l’industrie alimentaire, textile, le travail du bois, l’industrie des produits minéraux et celle du métal), le secteur de la construction, les services auxiliaires des transports, l’hôtellerie restauration. Dans les secteurs de services, les risques relatifs de décès étaient moindres, à l’exception notable des services auxiliaires des transports, des services aux entreprises, et de la santé et action sociale. L’étude de la mortalité par cause a montré que les excès de risque de décès selon la cause n’étaient pas les mêmes dans tous les secteurs. Ainsi, des excès de mortalité par tumeur maligne étaient retrouvés dans l’industrie des produits minéraux et celle du métal, dans la construction, les services auxiliaires des transports, l’hôtellerie restauration et les services aux entreprises, ce dernier étant essentiellement représenté par les travailleurs de l’intérim. La mortalité accidentelle concernait quant à elle davantage les secteurs de la construction, du commerce et de la réparation automobile et des transports terrestres tandis que les secteurs marqués par une surmortalité par suicides étaient les secteurs des services aux entreprises, de l’administration publique et de la santé et de l’action sociale. 

Des analyses thématiques ont par ailleurs permis de produire des résultats pour la mortalité par suicide et la mortalité cardiovasculaire.