Surmorbidité et surmortalité jusqu’à 1 an des enfants nés entre 35 et 38 semaines d’aménorrhée en France métropolitaine

// Increased morbidity and mortality of children born at 35-38 weeks of gestation in Metropolitan France

Evelyne Combier1, Jean-Bernard Gouyon2, Adrien Roussot3, Jonathan Cottenet3, Catherine Quantin3,4 (catherine.quantin@chu-dijon.fr)
1 Centre d’épidémiologie des populations EA4184, Université de Bourgogne, Dijon, France
2 Centre d’études périnatales de l’Océan Indien, CHU Sud Réunion, La Réunion, France
3 CHRU Dijon, Service de biostatistique et d’informatique médicale (DIM), Dijon, France
4 Inserm U866, Université de Bourgogne, Dijon, France
Soumis le 10.09.2014 // Date of submission: 09.10.2014
Mots-clés : Prématurité tardive | Terme précoce | Morbidité | Mortalité | PMSI
// Keywords: Late preterm | Early term | Morbidity | Mortality | Hospital discharge data

Résumé

Introduction –

Le pronostic de la prématurité tardive et du terme précoce (respectivement 35-36 SA et 37-38 SA) reste mal précisé dans la première année de vie.

Matériel et méthodes –

La base nationale du PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d’information) 2011 a été utilisée pour évaluer le pronostic à 1 an des enfants uniques nés vivants, sans anomalie congénitale et dont l’âge gestationnel était compris entre 35 et 41 semaines de gestation complètes. Trois groupes d’étude ont été définis : prématurité tardive (35-36 SA), termes précoces (37-38 SA) et groupe contrôle (39-41 SA).

Résultats –

Pour 681 961 enfants inclus, une hospitalisation à J0-J27 (6,4% à 39-41 SA) a été d’autant plus fréquente que l’âge gestationnel était faible, y compris à 38 SA (8,8%). La même tendance significative était retrouvée pour l’hospitalisation en réanimation néonatale (5,8% à 35 SA ; 2,6% à 36 SA ; 1,0% à 37 SA ; 0,4% à 38 SA ; 0,3% à 39-41 SA). Une hospitalisation entre J28 et J365 a concerné 11,9% de la population (bronchiolites : 17,1% ; gastroentérites : 10,6% ; pathologies ORL : 5,5% ; accidents : 6,2%). Ont été enregistrés : 277 décès hospitaliers de J0 à J27 [0,4/1 000], et 226 de J28 à J365 [0,3/1 000]. Après ajustement sur le sexe et les pathologies gestationnelles, les RR de la mortalité restaient significativement supérieurs à 1 à 35, 36 et 37 SA.

Conclusion –

Le pronostic des naissances entre 35 et 38 SA est moins favorable qu’à 39-41 SA.

Abstract

Introduction –

The prognosis of late preterm and early-term births (35-36 weeks and 37-38 weeks, respectively) in the first year of life is not precisely established.

Material and methods –

The French hospital database of the PMSI (2011) allowed us to assess the outcome in the first year of single live births without congenital anomalies at a gestational age (GA) ranging from 35 to 41 completed weeks of gestation. Newborns were categorized in 3 groups: late preterm (GA=35-36 weeks), early term (37-38 weeks), and control group (39-41 weeks).

Results –

The study included 681,961 newborns. Hospitalization rate at D0-D127 (6.4% at 39-41 weeks) was more frequent as the GA was, even at 38 weeks (8.8%). The same significant trend was observed for the hospitalization rate in neonatal intensive care units (5.8% at 35 weeks; 2.6% at 36 weeks; 1.0% at 37 weeks; 0.4% at 38 weeks; 0.3% at 39-41 weeks). Between day 28 and day 365, 11.9% of the population were admitted to hospital (bronchiolitis: 17.1% – gastroenteritis: 10.6% – ENT diseases: 5.5% – accidents: 6.2%). There were 277 hospital deaths from day 0 to day 27 [0.4/1,000] and 226 from day 28 to day 365 [0.3/1,000]. After adjustment for sex and diseases of pregnancy, the RR of death remained significantly above 1 at 35, 36 and 37 weeks.

Conclusion –

The prognosis for infants born at 35-38 weeks is less favorable than that in infants born at 39-41 weeks.

Introduction

Pour des cycles réguliers de 28 jours, la durée normale de la gestation varie entre 280 et 290 jours à partir du 1er jour de la date des dernières règles soit, exprimée en semaines d’aménorrhée (SA), de 40+0 SA à 41+3 SA. Selon le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), le terme est la période qui va de 37+0 à 41+6 SA 1. On considère que, pendant cette période de 5 semaines, le pronostic néonatal est uniformément bon 1,2.

Récemment, l’attention a été attirée sur la surmorbidité et la surmortalité qui accompagnent non seulement la prématurité tardive (35-36 SA) mais aussi les naissances à 37-38 SA, comparativement à celles des enfants nés à 39, 40, 41 SA 3,4,5,6. Cette constatation a amené l’American College of Obstetricians and Gynecologists et la Society for Maternal-Fetal Medicine à proposer une nouvelle définition des naissances « à terme » 2. Ils classent ainsi la durée de gestation « à terme » en : terme précoce (early term : 37+0-38+6/7 SA), terme vrai (full term : 390/7-406/7 SA), terme prolongé (late term : 410/7-416/7 SA) et terme dépassé (post term : 420/7 SA et plus).

Peu d’études ont concerné la prématurité tardive (35+0-36+6 SA) et les termes précoces (37+0-38+6 SA). Pourtant, ces dernières populations sont quantitativement très importantes et méritent une attention particulière, car l’altération du pronostic dès la période néonatale et les conséquences à long terme restent à préciser 7.

L’objectif de cette étude était d’évaluer, à partir des données de la base nationale du PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d’information), les surmorbidités et surmortalités néonatales associées à la prématurité modérée (35-36 SA) et au terme précoce (37-38 SA), ainsi que l’impact à court terme (<1 an) de ces accouchements avant 39 SA, la population de référence étant celle des enfants nés à 39-41 SA.

Matériel et méthodes

Population étudiée

L’étude a porté sur les naissances uniques, hors malformation, survenues en France métropolitaine pendant l’année 2011. Les données utilisées sont celles des bases nationales du PMSI 2011 pour les naissances et 2011-2012 pour les hospitalisations. Les variables périnatales nécessaires à cette étude sont apparues robustes dans une étude comparative du PMSI national et de l’enquête nationale périnatale (ENP) 2010 8.

Dans un premier temps, on a isolé 818 595 résumés de sortie anonymes (RSA) correspondant à des naissances vivantes enregistrées (1) en 2011. Après exclusion des naissances hors métropole (N=37 292), des naissances multiples (N=26 196), des RSA sans numéro d’anonymisation permettant le chaînage des hospitalisations (N=26 378), des naissances avant 35 SA ou après 41 SA (N=20 280) et des malformations congénitales ou aberrations chromosomiques (N=26 548), notre étude a porté sur 681 961 enfants uniques, nés vivants, en France métropolitaine, à un âge gestationnel de 35 à 41 SA (figure).

Figure : PMSI 2011 – Algorithme de tri des RSA* qui seront inclus dans l’étude
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Variables étudiées

Les décès ont été repérés à partir des groupes homogènes de malades (GHM) et du mode de sortie figurant sur les RSA. L’âge au moment du décès a été calculé en ajoutant la durée du séjour à l’âge en jours à l’admission.

Pour chaque enfant, les RSA ont été chaînés au RSA de la naissance en séparant deux périodes : 1) les hospitalisations J0-J27, c’est-à-dire celles dont l’âge à l’admission était inférieur à J28, quel que soit l’âge à la sortie ; 2) les hospitalisations J28-J365, pour lesquelles l’âge à l’admission était supérieur à J27 et inférieur à 1 an.

Pour les hospitalisations J0-J27 :

a) on a considéré que l’enfant avait été hospitalisé, tous services confondus, si on comptabilisait plusieurs RSA pour cette période ou, lorsqu’il n’y avait qu’un seul RSA, si celui-ci comportait au moins un supplément (2). La durée totale de séjour, tous services confondus, est la somme des durées de séjour des RSA successifs ;

b) dans un 2e temps, on a étudié les hospitalisations en service de pédiatrie néonatale. Ces hospitalisations et leur niveau de soins ont été repérés à partir des suppléments mentionnés : néonatologie (NN1), soins intensifs (NN2) ou réanimation néonatale (NN3).

Le niveau maximal de prise en charge en service de pédiatrie néonatale a été estimé à partir des suppléments perçus. La hiérarchisation retenue est celle des niveaux de soins : réanimation > soins intensifs > néonatologie. La durée de séjour dans chacun des niveaux de soins est la somme des suppléments perçus pour chacun des niveaux (un supplément facturé par jour de présence (2)).

Les RSA des séjours J28-J365 (admissions après J27) ont été regroupés par grandes catégories de pathologies selon la classification internationale des maladies – 10e révision (CIM-10) à partir des diagnostics principaux figurant sur les RSA : causes infectieuses (bronchiolites, gastroentérites, ORL), accidentelles (causes traumatiques, intoxications, brûlures, corps étrangers), tumeurs malignes et hospitalisations pour maltraitance.

Traitements statistiques

Nous avons analysé l’effet du terme à la naissance sur la mortalité infantile et ses différentes composantes, les hospitalisations successives (motifs, niveaux de soins, durées) survenues pendant la première année de vie. La classe de référence retenue pour le terme est la classe 39-41 SA.

Pour les analyses bivariées portant sur des variables qualitatives, nous avons utilisé le test du Chi2 pour comparer les pourcentages et le « d » de Somers pour analyser les tendances. La comparaison des valeurs moyennes des variables quantitatives a été faite en utilisant des régressions linéaires.

Les modalités de prise en charge dans chaque établissement de la grossesse, de l’accouchement et du post-partum pouvant influencer l’état de santé des nouveau-nés, nous avons utilisé pour analyser l’effet propre du terme à la naissance et pour chaque variable d’intérêt des modèles marginaux et des régressions binomiales négatives, qui permettent de prendre en compte la structure hiérarchique des données et leur sur-dispersion 9. Un ajustement a été fait sur le sexe de l’enfant et les pathologies de la grossesse signalées par les codes P01n (P01-P019 : Fœtus et nouveau-né affectés par les complications de la grossesse chez la mère) et P02n (P02-P029 : Fœtus et nouveau-né affectés par des complications concernant le placenta, le cordon ombilical et les membranes) de la CIM-10 dans les diagnostics associés d’un ou plusieurs RSA. Les enfants décédés en période néonatale (J0-J27) ont été exclus pour les analyses des évènements (Décès et hospitalisations) survenus de J28 à J365.

Les analyses ont été faites à l’aide des procédures FREQ, REG et GENMOD du logiciel SAS® version 9.3 (SAS Institute Inc., Cary, NC, États-Unis).

L’accès aux données de la base nationale a été autorisé par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (n° 1576793).

Résultats

Parmi les 681 961 nouveau-nés de l’étude (tableau 1-A), 1,2% sont nés à 35 SA, 2,4% à 36 SA, 5,8% à 37 SA, 15,4% à 38 SA et 75,2% à 39-41 SA ; 50,6% sont des garçons et 49,4% des filles. Le sexe-ratio global est de 1,02. Il existe une différence dans la répartition des termes entre les garçons et les filles (p<10-3) : le sexe-ratio est d’autant plus élevé que le terme est faible (1,19 à 35 SA vs 1,00 à 39-41 SA). La tendance est significative (p<10-3). Les filles sont plus souvent nées à 39-41 SA (76,1%) que les garçons (74,4%).

Tableau 1 : Âge gestationnel et sexe des enfants uniques, nés vivants, non malformés. A) Population totale – B) Enfants hospitalisés de J0 à J27. France, 2011
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Les enfants ayant fait l’objet d’une hospitalisation J0-J27, tous services confondus, représentent 8,7% de la population (N=59 438) (tableau 1-B). Ce taux est d’autant plus élevé que l’âge gestationnel est faible. Il est toujours supérieur à celui enregistré à 39-41 SA, y compris à 38 SA (8,8% vs 6,4%). La tendance est significative (p<10-3) et ce, quel que soit le sexe. Les garçons sont plus nombreux que les filles (54,6% vs 45,6%) à avoir été hospitalisés, mais le sexe-ratio est constant, quel que soit le terme à la naissance (p=0,21). Après ajustement sur le sexe et les pathologies de la grossesse (tableau 2), il persiste un gradient négatif des risques relatifs (RRa1). Ceux-ci sont tous significatifs et supérieurs à 1, y compris pour les termes de 38 SA, la référence étant la classe 39-41 SA.

Parmi les 59 438 enfants hospitalisés, 47 509 (tableau 2) l’ont été dans des services de pédiatrie néonatale. Le taux d’hospitalisation décroît avec l’âge gestationnel, le taux le plus bas étant enregistré à 39-41 SA ; la tendance est significative (p<10-3). Comme pour l’ensemble des hospitalisations, après ajustement sur le sexe et les pathologies de la grossesse, il persiste un gradient négatif des risques relatifs (RRa1). Ceux-ci sont tous significatifs et supérieurs à 1, y compris pour les termes de 38 SA, la référence étant la classe 39-41 SA.

Tableau 2 : Risque d’hospitalisation des enfants de J0 à J27 et de J28 à J365 en fonction du terme. France, 2011
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Le niveau maximum de prise en charge (tableau 3) est d’autant plus élevé que le terme est plus faible : 5,8% des enfants nés à 35 SA ont été hospitalisés en réanimation contre 2,6% à 36 SA, 1,0% à 37 SA, 0,4% à 38 SA et 0,3% à 39-41 SA. On retrouve la même tendance chez les enfants dont le niveau maximal a été une unité de néonatologie ou soins intensifs. Dans tous les cas, les taux d’hospitalisations pour les enfants de 35 à 38 SA sont supérieurs à ceux observés à 39-41 SA. Les tendances sont significatives (p<10-3). Après ajustement sur le sexe et les pathologies de la grossesse, pour les admissions en réanimation (tableau 2) comme pour l’ensemble des hospitalisations J0-J27 tous services confondus, ou en pédiatrie néonatale tous niveaux confondus, il persiste un gradient négatif des RR. Ceux-ci sont tous significatifs et supérieurs à 1, y compris pour les termes de 38 SA, (1,4 [1,3-1,6]), la référence étant la classe 39-41 SA.

Tableau 3 : Niveau de prise en charge lors des hospitalisations en service de pédiatrie néonatale (admissions J0-J27) en fonction de l’âge gestationnel. France, 2011
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La durée moyenne de séjour (DMS) pour l’ensemble des hospitalisations J0-J27, séjours en maternité compris, est d’autant plus longue que le terme est faible (tableau 4). Elle est de 5,9 jours (Intervalle de confiance à 95%, IC95%: [5,8-6,0]) à 35 SA contre 4,3 [4,3-4,3] jours à 38 SA et 4,1 [4,1-4,1] jours à 39-41 SA pour les enfants non transférés ou non hospitalisés en pédiatrie néonatale. Pour les enfants pris en charge en pédiatrie néonatale, tous niveaux de soins confondus, elle est de 12,1 [11,9-12,3] jours à 35 SA contre 8,1 [7,9-8,3] jours à 38 SA et 7,6 [7,5-7,7] jours à 39-41 SA. Dans les deux cas, la diminution des DMS en fonction du terme est significative (p<10-3). En revanche, la DMS en réanimation (tableau 4) n’est pas influencée par le terme à la naissance (p=0,17), contrairement à ce qu’on observe pour les hospitalisations en pédiatrie néonatale tous niveaux confondus ou pour les séjours dans les autres unités où la DMS décroit lorsque le terme augmente (p<10-3).

Tableau 4 : Durées moyennes des hospitalisations des enfants à J0-J27 en fonction de l’âge gestationnel et du lieu d’hospitalisation. France, 2011
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Pendant la première année de vie, on a enregistré à l’hôpital 503 décès (mortalité infantile hospitalière : 0,7/1 000), dont 277 de J0 à J27 (mortalité néonatale : 0,4/1 000) et 226 de J28 à J365 (mortalité post-néonatale : 0,3/1 000). Pour toutes les périodes (tableau 5), on observe une décroissance significative (p<10-3) des taux bruts de mortalité en fonction du terme, ceux-ci restant plus élevés à 37 et 38 SA qu’à 39-41 SA. Après ajustement sur le sexe et les pathologies de la grossesse, les RR de mortalité infantile, néonatale et post-néonatale restent supérieurs à 1 (tableau 5 : RRa1), la classe de référence étant 39-41 SA. Après ajustement sur le fait d’avoir été hospitalisé en période néonatale (tableau 5 : RRa2), pour les décès infantiles et néonatals, les RR ne sont plus significatifs pour les naissances à 38 SA. Pour les décès post-natals, le seul RR significatif est celui des naissances à 37 SA (1,9 [1,2-2,8]).

Tableau 5 : Mortalité hospitalière : taux de mortalité infantile, néonatale et post-néonatale par semaine d’âge gestationnel. France, 2011
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Parmi les 681 684 enfants vivants à J28, 80 977 (11,9%) ont été hospitalisés en période post-néonatale (admission de J28 à J365) pour un total de 114 757 séjours. Parmi ces enfants, 12 589 (1,9%) avaient déjà été hospitalisés en période néonatale (admission de J0 à J27). Le taux d’hospitalisations post-natales est plus élevé dans le groupe des enfants déjà hospitalisés en période néonatale (21,2% vs 11,0%). La différence est significative (p<10-3). Les causes infectieuses (tableau 6) ont été les principaux motifs d’hospitalisation (40,2%). Il s’agissait principalement de bronchiolites (17,1%), de gastroentérites (10,6%) et de pathologies ORL (5,5%). Les causes accidentelles ont été à l’origine de 6,2% des séjours. Prises individuellement, les autres causes comptent chacune pour moins de 2% des séjours. Il est à noter que 119 nourrissons ont été hospitalisés pour tumeur maligne (763 RSA) et 81 (84 RSA) pour maltraitance. Seulement 8,7% des séjours hospitaliers (N=9 943) sont classés en chirurgie.

Tableau 6 : Causes des hospitalisations post-néonatales (J28-J365). France, 2011
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Les taux bruts d’hospitalisations post-néonatales (admission J28-J365) par terme à la naissance (tableau 6) sont régulièrement décroissants de 35 à 39-41 SA. La tendance est significative (p<10-3).

Cette tendance (tableau 2) persiste après ajustement sur le sexe, les pathologies de la grossesse et les hospitalisations J0-J27. Par rapport à la classe de termes 39-41 SA, tous les RR sont significatifs et supérieurs à 1, y compris pour les naissances à 38 SA (1,1 [1,1-1,2]).

Les taux d’hospitalisation pour causes infectieuses, accidentelles ou chirurgicales sont régulièrement décroissants de 35 à 39-41 SA (tableau 6). Les tendances sont significatives (p<10-3). Contrairement à ce qu’on observe pour le taux d’hospitalisation pour tumeur maligne, la tendance est également significative pour le taux d’hospitalisation pour maltraitance (p=0,021).

À l’intérieur des groupes, on observe des résultats similaires en cas d’hospitalisation pour bronchiolite, gastroentérite, pathologie ORL (p<10-3) et, à un degré moindre, pour les hospitalisations pour traumatisme ou pour intoxication (p=0,002).

Discussion

Notre étude a porté sur une population de 681 961 enfants uniques nés vivants et non malformés, nés en 2011 dans un établissement d’accouchement de France métropolitaine. Pour isoler cette population, nous avons exclu dans un premier temps 26 196 enfants identifiés comme issus de grossesses multiples, soit 3,35% de la population. Ce taux est proche de celui enregistré par l’Insee pour 2011 (3,5%) ou dans l’ENP 2010 10 (3,1%±3%). Après exclusion des RSA non chaînables, la population restait comparable à celle de l’ENP tant pour la répartition des termes que pour celle des sexes et des taux de transfert.

Par ailleurs, le taux de mortalité observé dans notre étude ne représente qu’environ 1/5 de toute la mortalité infantile (N=2 568) enregistrée en 2011 en métropole. Une des principales explications du faible nombre de décès comptabilisés est l’exclusion des grands prématurés, des grossesses multiples, des malformations congénitales et des aberrations chromosomiques de la population étudiée. Il faut ajouter à cela la sous-déclaration des nouveau-nés morts en salle de naissance et le nombre important de décès survenant à l’extérieur de l’hôpital (domicile, voie publique …), comme par exemple les accidents domestiques et les morts subites du nourrisson.

Il est toutefois important de signaler que l’année 2011 a été une année charnière en matière de codage des séjours en maternité, les dernières recommandations datant du 26 octobre 2011 (3). Dans les années à venir, les données du PMSI pourront constituer une base importante pour les travaux menés en périnatalité, d’autant qu’il sera possible de chaîner les séjours des enfants à ceux de leurs mères.

En accord avec les publications françaises 5 ou internationales 11,12,13, notre étude confirme que, de 35 à 38 SA, il existe une relation continue entre âge gestationnel et morbi-mortalité néonatale, sans qu’aucun seuil de terme ne puisse être mis en évidence 12. En effet, si les taux d’hospitalisations de J0 à J27 et d’hospitalisations post-néonatales (J28-J365) décroissent régulièrement avec le terme, ils restent significativement supérieurs, à 38 SA, aux taux enregistrés à 39-41 SA. Il en est de même des taux de mortalité infantile et néonatale, bien que ceux-ci soient sous-estimés puisque nous ne connaissons que les décès enregistrés à l’hôpital. Nos résultats sont similaires à ceux trouvés en Suède 14,15 pour la mortalité néonatale et post-néonatale, et à ceux des études réalisées par Sengupta 3, Craighead 4 ou Linder 16 pour les admissions en réanimation. Mais les effets délétères d’une naissance avant 39 SA ne se limitent pas à la période néonatale puisque, dans notre étude, les taux de mortalité post-natale sont significativement plus élevés qu’à 39-41 SA. Par ailleurs, l’étude de la cohorte suédoise 14 a montré qu’il existait non seulement une surmortalité en période post-néonatale, mais aussi chez les enfants de 1 à 5 ans et chez les adultes jeunes pour les naissances à 37-38 SA.

Même si la différence de maturité reste en elle-même un facteur de risque de morbidité de J28 à J365, d’autres facteurs peuvent expliquer l’augmentation des taux d’hospitalisations enregistrés pendant cette période. On peut penser que les enfants nés avant 39 SA, qui sont plus jeunes en âge corrigé que ceux nés à terme, sont plus facilement hospitalisés et qu’ils bénéficient d’un meilleur suivi et d’un meilleur dépistage. Ceci est certainement vrai pour les hospitalisations pour maltraitance. Par ailleurs, on connaît le rôle délétère des mauvaises conditions socio-économiques, mais il est peu probable que ce facteur de risque agisse selon un gradient inversement proportionnel au terme.

Les enfants qui naissent à 35-38 SA représentent environ 25% des naissances vivantes. Bien que l’augmentation des risques de morbi-mortalité soit faible pour cette tranche d’âge gestationnel, un nombre important d’enfants risque d’être affecté par des pathologies d’origine périnatale. Comme peu d’études ont abordé le problème, les travaux actuels ne nous permettent pas d’évaluer le devenir à long terme de cette population quantitativement importante. Il en est de même de celui des enfants nés à 39-41 SA (73% des naissances uniques en 2011) dont l’état de santé a été altéré dès la période néonatale.

Les risques de détresse respiratoire sévère ou d’atteinte neurologique 5 ainsi que les durées moyennes de séjour (tableau 4) dans les différentes unités d’hospitalisation néonatale diminuent avec l’âge gestationnel mais, du fait du nombre important d’enfants concernés, leur prise en charge en réanimation et soins intensifs néonatals représente un pourcentage important des journées d’occupation des berceaux 4,17 de ces unités.

Conclusion

Cette étude confirme que naître à 35-38 SA est un facteur de risque de mortalité et de morbidité néonatale et infantile chez les enfants uniques indemnes de malformation et que, contrairement à l’idée couramment admise, les enfants nés à 37-38 SA sont plus à risque que ceux nés à 39-41 SA. Ces constatations devraient conduire à la redéfinition de ce qu’est une naissance à terme et à une modification des indications de déclenchement et de césarienne programmée à 37-38 SA 18.

La grande prématurité (naissances avant 33+0 SA, soit 1,3% des naissances vivantes en 2011) a, à juste titre, beaucoup mobilisé les pédiatres néonatologistes, les chercheurs, des experts en santé publique ainsi que les pouvoirs publics (régionalisation des soins périnatals) du fait de la gravité des pathologies néonatales, de la lourdeur des prises en charge et des moyens mobilisés. En revanche, peu d’études ont concerné la prématurité tardive (35+0-36+6 SA) et les termes précoces (37+0-38+6 SA). Pourtant, ces dernières populations sont quantitativement très importantes et méritent une attention particulière, car leur pronostic est altéré dès la période néonatale et les conséquences à long terme restent à préciser. Comme cela a été fait pour les naissances de moins de 33 SA, des études devraient être menées pour mieux connaître les besoins spécifiques de ces enfants en matière d’offre de soins et plus particulièrement de services hospitaliers.

Remerciements

Nous tenons à remercier Jennifer Zeitlin et Béatrice Blondel pour leurs conseils et critiques constructives des résultats.

Références

1 CNGOF. Mises à jour en gynécologie et obstétrique – Grossesses prolongées et terme dépassé. Mises à jour en obstétrique. J Gynecol Obstet Biol Reprod. 2011;40(8):693-962.
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4 Craighead DV, Elswick RK, Jr. The influence of early-term birth on NICU admission, length of stay, and breastfeeding initiation and duration. J Obstet Gynecol Neonatal Nurs. 2014;43(4):409-21.
5 Gouyon JB, Vintejoux A, Sagot P, Burguet A, Quantin C, Ferdynus C. Neonatal outcome associated with singleton birth at 34-41 weeks of gestation. Int J Epidemiol. 2010;39(3):769-76.
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Citer cet article

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2 Arrêté du 19 février 2009 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d’hospitalisation pour les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie et pris en application de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale. Journal officiel de la République française du 26 février 2009. http://www.legifrance.gouv.fr
/affichTexte.do?cidTexte=
JORFTEXT000020310296&
categorieLien=id
3 Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité. Instruction
N° DGS/DGOS/DREES/MC1/R3/
BESC/2011/403 du 26 octobre 2011 relative au rappel des modalités d’enregistrement et de codage des mort-nés dans le PMSI nécessaires à la production de l’indicateur de mortinatalité. http://circulaire.legifrance.gouv.fr
/pdf/2011/11/cir_34067.pdf