Dépistage des hépatites B et C en France en 2016, nouvelle édition de l’enquête LaboHep

// Hepatitis B and C screening in France in 2016. The new edition of the LaboHep Study

Corinne Pioche (corinne.pioche@santepubliquefrance.fr), Lucie Léon, Sophie Vaux, Cécile Brouard, Florence Lot
Santé publique France, Saint-Maurice, France
Soumis le 09.02.2018 // Date of submission: 02.09.2018
Mots-clés : Dépistage | Hépatite B | Hépatite C | France
Keywords: Screening | Hepatitis B virus | Hepatitis C virus | France

Résumé

Objectif –

Estimer l’activité de dépistage de l’hépatite C (anticorps (Ac) anti-VHC) et de l’hépatite B (antigène (Ag) HBs) en 2016 aux niveaux national, régional et, pour la première fois, départemental, et comparer les indicateurs à ceux estimés dans les deux enquêtes précédentes.

Méthodes –

L’enquête LaboHep 2016 a été menée rétrospectivement en 2017 auprès d’un échantillon aléatoire de laboratoires de biologie médicale (LBM). Le nombre de tests Ac anti-VHC et Ag HBs, le nombre de tests confirmés positifs pour la première fois dans le LBM, ainsi que le sexe et l’âge des personnes confirmées positives ont été recueillis. Les estimations ont été réalisées en tenant compte du plan de sondage et après redressement sur l’activité des LBM.

Résultats –

En 2016, 4,1 millions [IC95%: 3,9-4,4] de tests anti-VHC et 4,3 millions [4,0-4,6] de tests Ag HBs ont été réalisés en France, en augmentation continue par rapport à 2010 et 2013. Le nombre de tests anti-VHC confirmés positifs (45/100 000 habitants) et le taux de positivité des Ac anti-VHC (0,7%) étaient en baisse par rapport à 2013 (49/100 000 habitants et 0,9% respectivement). Le nombre de tests Ag HBs confirmés positifs (51/100 000 habitants) et le taux de positivité de l’Ag HBs (0,8%) sont restés stables.

Conclusion –

LaboHep 2016 montre que l’activité de dépistage des hépatites B et C en France a continué à augmenter par rapport aux années précédentes. L’enquête a permis de fournir des données départementales. Ces estimations sont utiles pour orienter et mesurer l’impact de la stratégie de dépistage.

Abstract

Objectives –

Estimate screening activity of hepatitis C (anti-HCV virus antibodies) and hepatitis B (surface antigen HBsAg) in  2016, at the national, regional, and for the first time, at the departmental levels, and compare indicators to those estimated in previous surveys.

Methods –

The 2016 LaboHep survey was conducted retrospectively in 2017 from a random sample of biomedical laboratories. The number of anti-HCV and HBsAg tests, the number of positive confirmed tests, and the gender and age characteristics of the individuals confirmed positive for the first time in each laboratory were collected. The estimations were performed taking into account the survey design after adjustment on the laboratories screening activity.

Results –

In 2016, 4.1 million [95%CI: 3.9-4.4] anti-HCV tests and 4.3 million [95%CI: 4.0-4.6] HBsAg tests were performed in France, a continuous increase compared to 2010 and 2013. The number of confirmed positive anti-HCV tests (45/100,000 inhabitants) and the positivity rate of the anti-HCV antibody (0.7%) were decreasing compared with 2013 (49/100,000 inhabitants and 0.9% respectively). The number of confirmed positive HBsAg tests (51/100,000 inhabitants) and the positivity rate of HBsAg (0.8%) remained stable.

Conclusion –

The survey LaboHep 2016 revealed that hepatitis B and C screening activity in France continues to increase compared to previous years, and it provided departmental data. These estimates are necessary for guiding screening strategies and measuring their impact.

Introduction

Le dépistage des hépatites virales B (VHB) et C (VHC) est un enjeu de santé publique important. Depuis plusieurs années, les experts recommandent de renforcer et de diversifier l’offre de dépistage des hépatites 1, dans le but d’atteindre les personnes ne connaissant pas leur statut virologique et celles les plus éloignées du système de soins. Dépister précocement les personnes infectées par les virus des hépatites permet de leur proposer une prise en charge adaptée pour guérir du VHC grâce aux nouveaux agents antiviraux à action directe (AAD) ou pour réduire la progression des complications graves du foie (cirrhose ou carcinome hépatocellulaire) liées au VHB. De plus, un dépistage précoce permet de diminuer le risque de transmission par la mise en place de mesures de prévention dans l’entourage de la personne infectée.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est fixée comme objectif d’éliminer les hépatites virales d’ici 2030 et encourage toutes les stratégies innovantes pour améliorer l’accès à leur dépistage 2. Bien que le dépistage des hépatites virales en laboratoires reste la méthode classique de référence 3, les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) complètent désormais l’offre de dépistage. Réalisés dans un cadre non médicalisé, en milieu associatif ou médico-social, les TROD permettent de toucher des populations exposées insuffisamment dépistées. Ils sont désormais disponibles en France pour dépister le VHC et le seront bientôt pour le VHB.

Afin de contribuer à l’évaluation de l’impact de la stratégie de dépistage du VHB et du VHC, l’Institut de veille sanitaire, devenu Santé publique France depuis le 1er mai 2016, a mis en place dès 2000 une surveillance de l’activité de dépistage de ces deux virus. Cette surveillance repose, depuis 2010, sur les enquêtes transversales triennales LaboHep 4,5, réalisées auprès d’un échantillon aléatoire de laboratoires de biologie médicale (LBM). Les objectifs de ces enquêtes sont de produire des indicateurs de dépistage des anticorps (Ac) anti-VHC et de l’antigène (Ag) HBs, aux niveaux national et infra-national, de suivre l’évolution de ces indicateurs dans le temps et de décrire les principales caractéristiques sociodémographiques des personnes diagnostiquées positives.

Cet article présente les résultats de l’enquête LaboHep 2016 avec, pour la première fois, la production d’estimations de l’activité de dépistage du VHC et du VHB au niveau départemental.

Méthodes

Échantillonnage

L’enquête LaboHep 2016 a été menée en 2017 auprès d’un échantillon de 2 008 LBM, construit par sondage aléatoire stratifié par type de laboratoire (privé, public, Service de santé des Armées, autres types) et par département, à partir des 4 248 LBM provenant de la base LaboVIH, régulièrement mise à jour pour la surveillance de l’activité de dépistage du VIH. L’ensemble des LBM du secteur public a été sollicité pour participer. Concernant le secteur privé, le tirage au sort a été réalisé proportionnellement au nombre de LBM privés du département. Pour chaque LBM, un mois a été tiré au sort pour le recueil des caractéristiques sociodémographiques des personnes nouvellement diagnostiquées positives pour les Ac anti-VHC ou l’Ag HBs en 2016 dans le laboratoire.

Recueil de données

Les données ont été recueillies pour tout patient âgé d’au moins 1 an et concernaient : 1) l’activité de dépistage, définie comme le nombre de prélèvements réalisés en 2016 pour recherche des Ac anti-VHC ou de l’Ag HBs, quelle qu’en soit l’indication (dépistage, contrôle/confirmation ou indication non précisée) ; 2) le nombre de prélèvements confirmés positifs en 2016 pour les Ac anti-VHC ou l’Ag HBs pour la première fois dans le laboratoire ; 3) les caractéristiques, en termes d’âge et sexe, des personnes confirmées Ac anti-VHC ou Ag HBs positives pour la première fois dans le laboratoire au cours du mois tiré au sort. Le recueil des données a été réalisé sur la base d’un questionnaire adressé par courrier aux LBM tirés au sort. Deux relances écrites et des relances téléphoniques ont été effectuées.

Analyses

Les estimations des différents indicateurs ont été réalisées en tenant compte du plan de sondage et en effectuant un redressement sur l’activité de l’ensemble des LBM français.

Pour les LBM privés, les données d’activité utilisées ont été le nombre d’actes de dépistage d’Ac anti-VHC et d’Ag HBs par département, remboursés par l’Assurance maladie en 2016 (données du système national d’informations inter-régimes de l’Assurance maladie – Sniiram).

Pour les LBM publics, en l’absence de données d’activité anti-VHC et Ag HBs disponibles, le redressement a été réalisé à partir de l’activité de dépistage du VIH, estimée par département pour 2016 grâce aux données de l’enquête LaboVIH 6, en faisant l’hypothèse d’une bonne corrélation entre l’activité de dépistage du VIH et celle du VHB et du VHC par laboratoire. Les données des LBM du Service de santé des Armées et des autres types de laboratoires non privés ont été intégrées à celles des LBM publics.

Le taux de positivité a été défini comme étant le rapport du nombre de tests confirmés positifs sur le nombre de tests réalisés. En ce qui concerne les caractéristiques individuelles des personnes diagnostiquées anti-VHC ou Ag HBs positives, le redressement a permis d’extrapoler à l’ensemble de l’année les données recueillies sur un mois.

Les indicateurs estimés ont été rapportés à la population vivant en France (estimations provisoires Insee, arrêtées fin 2016) et ont été comparés à ceux estimés en 2010 et 2013. Les analyses ont été réalisées avec le logiciel Stata® 12.0.

Résultats

Participation

Parmi les 2 008 LBM sélectionnés, 1 079 (54%) ont participé à l’enquête. Cette participation, équivalente à celle de 2010 (53%), a été inférieure à celle de 2013 (60%). Le taux de participation des LBM du secteur public a été plus élevé (64%) que celui du secteur privé (51%). Il a été également plus élevé en France métropolitaine (54%) que dans les départements et régions d’Outre-mer (DROM) (39%). Le taux de participation le plus important a été observé en Bretagne (74%) et le plus faible en Guyane (18%).

Dépistage des Ac anti-VHC

Activité de dépistage des Ac anti-VHC

En 2016, le nombre de tests Ac anti-VHC réalisés a été estimé à 4,1 millions (intervalle de confiance à 95%, IC95%: [3,9-4,4]), dont 2,9 millions [2,7-3,1] dans les LBM privés (71%) et 1,2 millions [1,0-1,4] dans les LBM publics. Après une augmentation de 6% entre 2010 et 2013, ce nombre a augmenté de 14% entre 2013 et 2016, de façon plus importante dans les LBM du secteur privé (+15%) que dans ceux du public (+10%). En comparaison avec les données de LaboHep 2013, une augmentation de l’activité de dépistage a été observée dans la plupart des régions, et de façon plus marquée en Guyane, à Mayotte et en Martinique, ainsi qu’en Île-de-France (tableau).

Tableau : Estimations du nombre de tests réalisés et du nombre de tests confirmés positifs* VHC et VHB en 2013 et 2016, selon la région. Enquête LaboHep 2016, France
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Rapporté à la population France entière, le nombre de tests Ac anti-VHC a été estimé à 62 pour 1 000 habitants (53/1 000 en 2010 et 55/1 000 en 2013). Les taux les plus importants ont été observés à Paris (174/1 000 habitants), dans le Val-de-Marne (125/1 000) et dans les départements français d’Amérique (DFA) : Martinique (111/1 000), Guadeloupe (106/1 000) et Guyane (101/1 000), ainsi que dans les Alpes-Maritimes (97/1 000) (figure 1a).

Figure 1 : Nombre de tests Ac anti-VHC et Ag HBs pour 1 000 habitants et nombre de tests Ac anti-VHC et Ag HBs confirmés positifs* pour 100 000 habitants, par département. Enquête LaboHep 2016, France
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Nombre de tests anti-VHC confirmés positifs et taux de positivité

Le nombre de tests anti-VHC confirmés positifs pour la première fois en 2016 a été estimé à 30 229 [26 189-34 269], dont 15 524 dans les LBM privés (51%) et 14 705 dans les LBM publics. Après une augmentation de 10% entre 2010 et 2013, ce nombre a diminué de 7% entre 2013 et 2016, de manière plus importante dans les LBM publics (-10%) que privés (-5%). Entre 2013 et 2016, la diminution du nombre de tests confirmés positifs a été particulièrement marquée, en métropole, dans les régions Pays de la Loire, Grand Est et Île-de-France. À l’inverse, une augmentation conséquente des tests confirmés positifs a été observée en Guyane et en Martinique (tableau).

Rapporté à la population française, le nombre de tests confirmés positifs a été estimé à 45 pour 100 000 habitants (46/100 000 en 2010 et 49/100 000 en 2013). Le taux était plus important en région Île-​de-France (95/100 000), notamment à Paris (212/100 000) et en Seine-Saint-Denis (133/100 000), puis en région Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca) (61/100 000), notamment dans les départements des Hautes-Alpes et du Vaucluse (respectivement 93 et 85 tests pour 100 000 habitants), ainsi que dans la région Occitanie avec le département de l’Hérault (92/100 000) (figure 1b).

Le taux de positivité des Ac anti-VHC a été estimé à 0,7% [0,7-0,8] pour l’ensemble des LBM, en baisse par rapport à 2010 et 2013 (respectivement 0,9%). Le taux était plus élevé dans les LBM du secteur public que dans ceux du privé (respectivement 1,2% et 0,5%) et dans les régions Île-de-France et Occitanie (respectivement 1,0% et 0,9%) que dans les autres régions.

Distribution des personnes confirmées anti-VHC positives par classe d’âge et sexe

Les personnes confirmées anti-VHC positives pour la première fois en 2016 étaient majoritairement des hommes (56%) et leur moyenne d’âge était de 51 ans (médiane de 51 ans). Les classes d’âge les plus représentées, chez les hommes, étaient les 50-59 ans (28%) et les 40-49 ans (27%) (figure 2).

L’âge moyen des femmes confirmées anti-VHC positives était de 52 ans (médiane de 50 ans). Les classes d’âge les plus représentées, chez les femmes, étaient les 40-49 ans (21%) et les 50-59 ans (19%) (figure 2).

Figure 2 : Distribution des tests confirmés positifs* pour les anticorps (Ac) anti-VHC selon le sexe et l’âge des personnes. Enquête LaboHep 2016, France
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Dépistage de l’Ag HBs

Activité de dépistage de l’Ag HBs

En 2016, le nombre de tests Ag HBs a été estimé à 4,3 millions [4,0-4,6], dont 3,0 millions [2,9-3,2] dans les LBM privés (71%) et 1,3 millions [1,1-1,5] dans les LBM publics. Après une croissance de 11% entre 2010 et 2013, ce nombre a augmenté de 14% entre 2013 et 2016, de façon plus importante dans les LBM du secteur privé (+15%) que ceux du public (+12%). En comparaison avec les données de LaboHep 2013, l’augmentation de l’activité de dépistage a été observée dans la plupart des régions, principalement en Guyane, Mayotte et en Île-de-France (tableau).

Rapporté à la population française, le nombre de tests Ag HBs a été estimé à 65 pour 1 000 habitants (53/1 000 en 2010 et 58/1 000 en 2013). Les taux étaient particulièrement élevés en Île-de-France (100/1 000), notamment à Paris (172/1 000 habitants), dans les départements du Val-de-Marne (133/1 000), de la Seine-Saint-Denis (96/1 000) et des Hauts-de-Seine (92/1 000), ainsi que dans les DFA (Guyane (120/1 000), Guadeloupe (108/1 000) et Martinique (101/1 000). Une activité de dépistage importante a été également observée en région Paca, notamment dans les départements des Alpes-Maritimes et des Bouches-​du-Rhône (respectivement 96 et 92/1 000 habitants).

Nombre de tests Ag HBs confirmés positifs et taux de positivité

Le nombre de tests Ag HBs confirmés positifs pour la première fois en 2016 a été estimé à 33 962 [28 265-39 659], dont 19 679 dans les LBM du secteur privé (58%) et 14 283 dans les LBM publics. Après une augmentation de 45% entre 2010 et 2013, ce nombre a continué d’augmenter, mais de manière moins importante, entre 2013 et 2016 (+6%) et uniquement dans le secteur privé (+14%). Dans le secteur public, il a diminué (-4%) sur la période. Au niveau régional, une augmentation importante des tests confirmés positifs a été observée, entre 2013 et 2016, en Guyane, Mayotte, Martinique et en Normandie (tableau).

Rapporté à la population française, le nombre de sérologies Ag HBs confirmées positives a été estimé à 51/100 000 habitants (34/100 000 en 2010 et 49/100 000 en 2013). Les taux les plus élevés ont été observés en Île-de-France (145/100 000), principalement à Paris (318/100 000), en Seine-Saint-Denis et en Seine-et-Marne (185 et 128/100 000 respectivement). Dans les DROM, les taux étaient élevés en Guyane (183/100 000) et dans le secteur public à Mayotte (344/100 000).

Le taux de positivité de l’Ag HBs a été estimé à 0,8% [0,7-0,9] pour l’ensemble des LBM français, stable par rapport à 2013 (0,7% en 2010 et 0,8% en 2013), plus élevé dans les LBM du secteur public que du privé (1,1% vs 0,6%). En région, les taux les plus élevés ont été observés à Mayotte dans le secteur public (3,8%), en Guyane (1,5%) et en Île-de-France (1,4%).

Distribution des personnes confirmées Ag HBs positives par classe d’âge et sexe

Les personnes confirmées Ag HBs positives pour la première fois en 2016 étaient majoritairement des hommes (54%) et leur moyenne d’âge était de 43 ans (médiane de 41 ans). Les classes d’âges les plus représentées, chez les hommes, étaient celles des 30-39 ans (25%) et des 40-49 ans (22%) (figure 3). La moyenne d’âge des femmes confirmées positives était de 41 ans (médiane de 38 ans), les classes d’âges les plus représentées étaient les 30-39 ans (33%) et les 20-29 ans (19%).

Figure 3 : Distribution des tests confirmés positifs* pour l’antigène (Ag) HBs selon le sexe et l’âge des personnes. Enquête LaboHep 2016, France
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Discussion

L’édition 2016 de l’enquête triennale LaboHep a permis d’estimer à, respectivement, 4,1 et 4,3 millions les nombres de tests anti-VHC et Ag HBs réalisés en 2016 dans les LBM en France entière. Par rapport aux deux précédentes enquêtes ayant eu lieu en 2010 4 et 2013 5, l’activité de dépistage du VHC et du VHB a encore augmenté en 2016 (+6% et +14% pour le VHC et +11% et +14% pour le VHB, respectivement, entre 2010-2013 et 2013-2016). Cette augmentation est en fait observée depuis le début des années 2000 dans les données de remboursement de l’Assurance maladie 7. Ces augmentations de l’activité de dépistage du VHB et du VHC sont cohérentes avec l’évolution des recommandations, qui ciblent depuis 2001 les personnes exposées au risque d’infection et qui ont été étendues, en 2014, aux hommes de 18 à 60 ans et aux femmes enceintes dès la première consultation prénatale 1. La recommandation de dépistage du VHC a ensuite été étendue, en 2016, à l’ensemble des adultes des deux sexes 8. Par ailleurs, la Haute Autorité de santé préconise la réalisation d’un test de dépistage de l’infection à VIH au moins une fois au cours de la vie et le recours aux dépistages conjoints du VIH, du VHB et du VHC 9.

Les données montrent, aussi bien pour le VHB que pour le VHC, que les tests étaient réalisés majoritairement (environ 70%) dans des LBM privés. Il existe des disparités selon les régions, mais aussi selon les départements. En métropole, c’est en Île-​de-France, et notamment à Paris, que les activités de dépistage du VHB et du VHC étaient les plus élevées ; c’est également dans cette région que les augmentations de dépistage ont été les plus marquées entre 2013 et 2016. Ce sont ensuite en Paca et en Occitanie que les efforts de dépistage étaient les plus importants. Les DROM étaient caractérisés par une activité de dépistage anti-VHC et Ag HBs plus élevée qu’en métropole.

En 2016, le nombre de tests anti-VHC confirmés positifs rapporté à la population (45/100 000) et le taux de positivité des Ac anti-VHC (0,7%) allaient dans le sens d’une baisse, par rapport aux estimations de 2013 (49/100 000 et 0,9% respectivement), alors que l’activité de dépistage pour le VHC continuait d’augmenter. Cette diminution est cohérente avec la diminution annuelle du nombre de personnes en ALD 6 (affection de longue durée) pour une hépatite chronique C depuis 2013 (données Sniiram) 10. Elle pourrait être liée en partie à l’impact des AAD de seconde génération, qui permettent la guérison de 90% des patients et sont disponibles depuis 2014 pour les patients à un stade avancé. En 2016, l’accès à ces traitements a été étendu aux patients asymptomatiques (stade de fibrose F0 ou F1) 11. Il a été estimé qu’un traitement par AAD de seconde génération avait été initié chez 22 600 personnes en 2014-2015 et que 20 300 avaient été guéries 12. Cette évolution est également à mettre en regard des politiques de réduction des risques, notamment vis-à-vis des usagers de drogues, principal réservoir de transmission du VHC. C’est en Île-de-France (notamment à Paris), en Paca (dans les Hautes-Alpes) et en Occitanie (dans l’Hérault), que les nombres de tests Ac anti-VHC confirmés positifs rapportés à la population étaient les plus élevés en 2016. Ces résultats sont cohérents avec les données de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), qui montrent que les prévalences déclarées de l’infection par le VHC chez les usagers de drogues injectables en Csapa (Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) et en Caarud (Centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues) dans ces régions étaient les plus élevées en 2015 10. Les données des prochaines éditions de LaboHep permettront de vérifier si cette tendance à la baisse se confirme. Dans les DROM, le taux de positivité des Ac anti-VHC, plus faible qu’en métropole, pourrait être lié à une moindre consommation de produits psychoactifs dans ces régions 13,14.

Concernant le VHB, le taux de positivité de l’Ag HBs a été estimé à 0,8% en 2016 en France, taux stable par rapport à 2013. L’Île-de-France a présenté, en 2016 comme en 2013, un nombre de tests Ag HBs confirmés positifs rapporté à la population supérieur à celui des autres régions métropolitaines. Dans les DROM, ces taux étaient également très élevés, notamment en Guyane et à Mayotte. La prévalence de l’Ag HBs chez les femmes enceintes a été estimée à 1,5% à l’hôpital de Cayenne 15 et à 3,3% à l’hôpital de Mayotte 16, en lien probable avec des populations immigrées originaires de pays de fortes prévalences pour le VHB. La comparaison avec les données LaboHep 2013 montre une augmentation du nombre de tests Ag HBs positifs dans ces deux DROM. Toutefois, en raison des plans de sondage différents entre les enquêtes LaboHep et de la faible participation des LBM dans ces deux régions en 2016, les comparaisons doivent rester prudentes. Une étude prochainement prévue à Mayotte devrait permettre de disposer d’estimations de prévalences du VHB et du VHC en population générale sur ce territoire.

Les enquêtes LaboHep, parce qu’elles reposent sur des techniques de sondages aléatoires, permettent de fournir des estimations nationales, régionales et, pour la première fois en 2016, départementales. Toutefois, elles présentent quelques limites. L’estimation du nombre de tests anti-VHC ou Ag HBs confirmés positifs pour la première fois ne doit pas être interprétée comme une estimation du nombre de personnes nouvellement diagnostiquées, dans la mesure où une même personne peut être comptabilisée plusieurs fois, notamment si elle est confirmée positive dans des LBM différents. Par ailleurs, l’annuaire des LBM réalisant des sérologies VIH a été choisi comme base de sondage en raison de son exhaustivité et de sa mise à jour régulière. Il est cependant possible que cette base ne soit pas totalement exhaustive vis-à-vis des LBM réalisant les sérologies anti-VHC et Ag HBs. Enfin, l’absence de participation de plusieurs laboratoires, malgré de multiples relances, n’a pas permis d’obtenir des estimations pour neuf départements.

En restituant, tous les trois ans, des données sur l’activité de dépistage à des niveaux infra-régionaux, les enquêtes LaboHep permettent de suivre l’activité de dépistage et d’identifier les territoires les plus concernés par les hépatites B et C. Elles contribuent ainsi à orienter les campagnes de prévention et de promotion du dépistage en population générale, ainsi qu’au suivi de l’impact de la stratégie de dépistage et des évolutions dans la prise en charge des personnes infectées par le VHC ou le VHB. Les résultats de ces études peuvent également contribuer à la sensibilisation des professionnels de santé au dépistage des hépatites virales.

Remerciements

Nous tenons à remercier tous les biologistes qui ont participé à l’enquête LaboHep 2016. Nous remercions également Françoise Cazein et Charly Ramus pour les données LaboVIH, ainsi qu’Hélène Haguy pour la réalisation des cartes.

Références

1 Prise en charge des personnes infectées par les virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C. Rapport de recommandations 2014 sous la direction du Pr Daniel Dhumeaux et sous l’égide de l’ANRS et de l’AFEF. Paris: Ministère des Affaires sociales et de la Santé; 2014. 537 p. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_Prise_en_charge_Hepatites_2014.pdf
2 Organisation mondiale de la santé. Stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale 2016-2021. Vers l’élimination de l’hépatite virale. Genève: OMS; 2016. 55 p. http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/250577/1/WHO-HIV-2016.06-fre.pdf
3 Haute Autorité de santé. Stratégies de dépistage biologique des hépatites virales B et C. Recommandation en santé publique. Mars 2011. [Internet]. https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1050355/fr/strategies-de-depistage-​biologique-des-hepatites-virales-b-et-c
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Citer cet article

Pioche C, Léon L, Vaux S, Brouard C, Lot F. Dépistage des hépatites B et C en France en 2016, nouvelle édition de l’enquête LaboHep. Bull Epidémiol Hebd. 2018;(11):188-95. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2018/11/2018_11_1.html